Ce qu’il faut retenir
Le nouveau locataire de la place Beauvau s’écarte de la ligne dure prônée par certains élus français, notamment après l’adoption d’une résolution réclamant la fin de l’accord bilatéral de 1968. Laurent Nuñez privilégie une diplomatie de « co-production des solutions », soucieuse de préserver les canaux sécuritaires avec Alger (Le Parisien, 1 novembre 2025).
- Ce qu’il faut retenir
- Paris prône une désescalade exigeante
- Contexte : l’accord de 1968 remis en cause
- Centres de rétention sous tension
- Calendrier des signaux bilatéraux
- Acteurs et équilibres politiques
- Coopération sécuritaire indispensable
- Cartographie des enjeux migratoires
- Scénarios possibles
- Perspectives
Paris prône une désescalade exigeante
Interrogé par Le Parisien, le ministre insiste : « Le bras de fer ne marchera pas ». Pour lui, la relation France-Algérie doit retrouver un espace de négociation « apaisé, mais exigeant », en écho à la visite de travail qu’il prépare à Alger à l’invitation de son homologue Saïd Sayoud. L’objectif est double : relancer la coopération policière et réactiver les retours consulaires.
Contexte : l’accord de 1968 remis en cause
Adoptée le 30 octobre, la résolution portée par le Rassemblement national et soutenue par une partie de la droite vise à dénoncer l’accord-cadre signé en 1968, qui octroie un régime migratoire spécifique aux Algériens. Le texte n’a pas de portée contraignante, le pouvoir de dénonciation relevant du président, mais il crée une pression politique inédite sur l’exécutif.
Centres de rétention sous tension
Selon le ministère, 500 éloignements forcés vers l’Algérie ont été réalisés depuis janvier, contre 1 400 sur la même période l’an dernier. Conséquence : 40 % des places en centre de rétention sont aujourd’hui occupées par des Algériens, un record qui alimente la critique parlementaire alors que les capacités nationales atteignent déjà la saturation.
Calendrier des signaux bilatéraux
Octobre 2025 : vote de la résolution à l’Assemblée. Novembre : prise de fonctions de Laurent Nuñez, rencontres préparatoires avec le Quai d’Orsay et la DGSE. Décembre : déplacement envisagé à Alger pour relancer le comité mixte sur la sécurité. Début 2026 : possible sommet présidentiel si les conditions diplomatiques se normalisent, sous l’égide de la Cellule Afrique de l’Élysée.
Acteurs et équilibres politiques
Bruno Retailleau, chef de file de LR, continue de plaider pour l’abrogation totale de l’accord de 1968, voyant dans la fermeté « l’unique langage audible ». À l’extrême droite, Marine Le Pen félicite « une étape vers la souveraineté migratoire ». Au Palais-Bourbon, la majorité présidentielle reste divisée ; certains redoutent qu’une rupture ne ferme la voie du dialogue sécuritaire.
Coopération sécuritaire indispensable
Pour les services français, l’Algérie demeure un partenaire majeur dans la lutte antiterroriste au Sahel et dans la surveillance des filières migratoires transsahariennes. Une note de la DGSI citée par Le Point (2 novembre 2025) affirme que « la rupture totale fragiliserait le partage de renseignements critiques sur les groupes affiliés à Al-Qaïda et Daech ».
Cartographie des enjeux migratoires
Une carte établie par l’IFRI rappelle que 82 % des traversées irrégulières algériennes vers l’Europe passent par l’Espagne, mais près de 45 000 Algériens résident légalement en France sous les dispositions de 1968. La révision de l’accord pourrait déplacer les flux vers d’autres routes méditerranéennes, avec un coût logistique et humanitaire encore difficile à évaluer.
Scénarios possibles
Premier scénario, le statu quo négocié : Paris et Alger consentent à réactualiser les avenants de 2001 sans toucher au cœur de l’accord. Deuxième scénario, l’adaptation juridique : un nouveau protocole s’aligne sur le droit commun européen, au prix d’une transition technique. Troisième scénario, la dénonciation unilatérale, qui ouvrirait une phase de refroidissement diplomatique et d’incertitude pour 700 000 binationaux.
Perspectives
Pour Laurent Nuñez, le succès se mesurera à la reprise progressive des laissez-passer consulaires et à une baisse de l’occupation des centres de rétention. Mais la temporalité politique française, dominée par l’approche des présidentielles de 2027, pourrait raccourcir la fenêtre de négociation. Dans ce contexte, le pari du dialogue paraît audacieux, mais sans doute nécessaire pour éviter une nouvelle crise d’ampleur.

