Ce qu’il faut retenir
Faustin-Archange Touadéra, au pouvoir depuis 2016, se présente pour un troisième mandat après la réforme constitutionnelle de 2023. Devant France 24, il assure que le calendrier électoral du 28 décembre 2025 sera tenu et que la sécurité des bureaux de vote est désormais « une priorité nationale ».
Le chef de l’État se félicite d’une « feuille de route » convenue avec Emmanuel Macron, marquant la normalisation d’une relation bilatérale mise à l’épreuve en 2021 lorsque Paris avait retiré ses troupes et suspendu une partie de son aide militaire.
Deux accords de paix ont déjà été paraphés avec l’UPC et le 3R. Des discussions demeurent actives avec le MPC de Mahamat al-Kathim. L’ONU constate une baisse globale des violations, tout en signalant une persistance de l’insécurité dans le nord-est et le sud-est du pays.
Contexte diplomatique Paris-Bangui
En 2021, la présidence française accusait Bangui d’être sous l’emprise du groupe Wagner, aboutissant à une réduction drastique de la coopération et au départ des unités françaises stationnées sur place. Bangui, confrontée alors à l’avancée rebelle vers la capitale, s’était tournée vers Moscou pour un appui sécuritaire d’urgence.
Quatre ans plus tard, la tonalité est résolument différente. Touadéra évoque des échanges « directs et francs » avec Emmanuel Macron et insiste sur la souveraineté de ses choix sécuritaires. Aucune mention explicite du remplacement des instructeurs russes n’a filtré, mais l’Élysée met en avant un « dialogue constructif » (France 24).
Paris cherche à réinvestir un champ diplomatique où la Chine, la Russie et les Émirats arabes unis ont accru leur présence, notamment via des concessions minières et des projets d’infrastructures. Le Quai d’Orsay souligne désormais un volet civil renforcé, axé sur la santé, l’éducation et l’agro-industrie.
Calendrier politique et sécuritaire en RCA
La Commission électorale nationale indique que l’impression des listes a été finalisée début octobre et que la formation des agents de vote se déroule dans les chefs-lieux des seize préfectures. Le ministère de l’Intérieur annonce le déploiement de 9 000 policiers et gendarmes, épaulés par les Forces armées centrafricaines.
La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA), dont le mandat court jusqu’à novembre 2026, a identifié 350 « zones sensibles » où une présence robuste sera maintenue durant le scrutin. Son porte-parole rappelle que la protection des civils reste la première responsabilité de l’État centrafricain.
Sur le plan économique, le gouvernement table sur une croissance de 3,5 % en 2025, soutenue par la reprise du chantier routier Bangui-Garoua-Bola. Les bailleurs, Banque mondiale en tête, conditionnent toutefois leurs décaissements à la tenue pacifique des élections et à la transparence budgétaire.
Acteurs clés du processus de paix
L’Unité pour la paix en Centrafrique du chef d’état-major Ali Darassa et le mouvement 3R de Sidiki Abass ont accepté en septembre une cessation des hostilités dans les préfectures de la Ouaka, de la Nana-Mambéré et de la Mambéré-Kadéï. Le désarmement est supervisé par la Commission mixte, coprésidée par le gouvernement et l’Union africaine.
Le Mouvement patriotique pour la Centrafrique, établi dans le nord-ouest, réclame la libération de certains cadres avant toute signature, une revendication jugée « négociable » par Bangui. Les Églises et les notabilités traditionnelles jouent un rôle d’intermédiaires, soulignant que « la paix ne se décrète pas, elle se bâtit », selon l’archevêque de Bangui.
Du côté international, l’Union européenne soutient le Fonds Bêkou, tandis que la CEEAC prépare une mission d’observation électorale. Washington, qui a levé une partie de ses sanctions sur les diamants de la zone Sud-Ouest, appelle à la « neutralité des forces de sécurité ».
Scénarios pour la coopération franco-centrafricaine
Analystes et diplomates envisagent trois trajectoires majeures à court terme. Le premier scénario, privilégié par Bangui, consolide un partenariat équilibré dans lequel la France finance la réforme de la justice et la remontée en puissance des universités publiques, pendant que la RCA maintient des accords sécuritaires diversifiés.
Un second scénario parierait sur une coopération essentiellement civile, Paris limitant son soutien militaire à la formation, voire à la fourniture d’équipements non létaux. Cette option suppose que Bangui obtienne des garanties sécuritaires alternatives, qu’elles soient onusiennes, régionales ou bilatérales.
Le troisième scénario, moins probable selon les spécialistes de l’IFRI, verrait un reflux de l’engagement français si le scrutin était contesté ou si l’insécurité redevenait endémique. Pour l’heure, Touadéra martèle qu’un scrutin « crédible et inclusif » est la meilleure assurance pour préserver le nouvel équilibre.

